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Recommandations secteur manufacturier consultations prébudgétaires 2020

contexte

JANVIER 2020

Le gouvernement du Québec s’est donné d’ambitieux objectifs en matière d’investissement, de numérisation des entreprises et de croissance des exportations. Le secteur manufacturier peut contribuer de façon significative à l’atteinte de ces objectifs. En effet, le secteur compte 23 981 entreprises, emploie 488 300 personnes et les ventes pour 2018 se sont chiffrées à 164,7 milliards $. Le secteur manufacturier est responsable pour 88 % de nos exportations.

Le secteur rencontre toutefois certains défis qui doivent être relevés si on veut s’assurer qu’il contribue davantage aux objectifs du gouvernement.

En matière d’investissement, le secteur manufacturier canadien est l’un des derniers parmi les pays de l’OCDE quant à l’investissement en capital. En 2017, les dépenses en machinerie et équipement étaient
21 % en dessous du niveau de 20051. Cela a un impact direct sur la croissance de la productivité qui est parmi les plus faibles dans les pays de l’OCDE. À titre d’exemple, la croissance de la productivité américaine a été trois fois plus importante que celle du Canada au cours des 15 dernières années.

En matière d’exportation, le Canada perd également des plumes. En l’an 20002, le Canada avait 4,3% des parts de marchés mondiales. Alors qu’en 2017, nous avons atteint un plancher de 2,4%.

À ce sujet, nous avons réalisé une étude auprès de nos membres afin d’identifier les défis rencontrés, et les solutions pour les inciter à investir et prendre le virage 4.0, ainsi que pour exporter d’avantage3.

Nos recommandations s’inscrivent dans le contexte des objectifs ambitieux dont s’est doté le gouvernement du Québec, en tenant compte des données sur l’investissement et l’exportation citées ci-haut, ainsi que sur diverses consultations réalisées auprès de nos membres.

1 CME: EMBRACING CHANGE:Industry 4.0 and Canada’s Digital Future in Manufacturing

2 CME: STALLED TRADE: Gearing Up Canadian Exports

3 CME:STALLED TRADE: Gearing Up Canadian Exports

A. STIMULER L’INVESTISSEMENT ET LA COMPÉTITIVITÉ DU SECTEUR MANUFACTURIER

  1. Revoir les taux des crédits d’impôt à la recherche et développement (R-D)

Rehausser les taux des crédits d’impôt à la R-D de 30 % à 37,5%, et de 14 % à 17,5 %

Le crédit R-D a pour but de soutenir l’ingénierie, la recherche scientifique et le développement expérimental au Québec.  Ce crédit permet aux entreprises canadiennes, et particulièrement à celles établies au Québec, d’être compétitives face à leurs concurrents situés aux États-Unis, en Europe et ailleurs.

S’il est vrai que ce crédit d’impôt bénéficie à un nombre restreint d’entreprises, particulièrement les plus grands manufacturiers, ce type de crédit est essentiel au maintien de leurs activités de R-D au Québec. De plus, ce sont de grands donneurs d’ordre qui octroient des contrats à des PME dans toutes les régions du Québec, ils sont responsables pour une part significative du PIB du Québec et de nos exportations.

Élargir le crédit d’impôt

De plus, nous recommandons que le crédit d’impôt soit applicable sur le deuxième niveau de sous-traitance, tel que cela se fait au fédéral. En outre, un nombre croissant d’entreprises utilisent des sous-traitants pour réaliser leurs tâches de R-D.

Simplifier

Enfin, nous tenons à réitérer que les réclamations sont complexes. À titre d’exemple, Revenu Québec demande les NAS de tous les employés qui sont impliqués dans les projets. Il y aurait lieu de simplifier les réclamations afin de s’assurer que les entreprises investissent moins de temps et d’argent dans ce processus administratif.

  1. Élargir le crédit d’impôt pour investissement (CII) relatif au matériel de fabrication et de transformation

Le CII exclut les coûts reliés à l’intégration des technologies numériques sur de l’équipement existant, la formation des employés sur ces nouveaux équipements, et exclut les entreprises qui font moins de 50 % de fabrication.

Pour permettre aux entreprises qui font de la fabrication de numériser leurs entreprises, au-delà de l’achat de l’équipement, les critères actuels du crédit d’impôt doivent être revus. La numérisation fait partie des priorités du gouvernement, il serait souhaitable que le crédit d’impôt couvre toutes les dépenses associées.

De plus, compte tenu du retard de productivité et du sous-investissement des PME manufacturières à l’échelle provinciale, nous recommandons que le crédit d’impôt soit maintenu pour Montréal et toutes les régions du Québec.

Enfin, il est important de mentionner que ce type de mesure permet aux entreprises d’avoir accès à du fonds de roulement, comparativement à un prêt qui pourrait être offert pour l’achat d’équipements. Ce crédit d’impôt permet également de rivaliser avec les mesures fiscales américaines.

3. Offrir de l’accompagnement aux PME pour l’Industrie 4.0

Les manufacturiers québécois ont un retard considérable en terme de productivité. Notre rapport « Embracing Change »[1] le démontre à plusieurs égards. Nos membres ont identifié trois obstacles à un accroissement des investissements pour prendre le virage 4.0, soit :

  • Manque d’information et d’opportunités pour tester les technologies
  • Retour sur investissement incertain
  • Pénurie de main-d’œuvre

Afin de contrer ces obstacles, nous recommandons au gouvernement de :

  • Poursuivre la tournée du Manufacturier Innovant afin de sensibiliser les PME sur l’importance de prendre le virage 4.0;
  • Organiser des visites en entreprise visant à démontrer aux PME manufacturières l’utilisation de diverses technologies;
  • Accompagner les entreprises dans l’identification des technologies, évaluer avec elles le retour sur investissement potentiel et les accompagner dans la mise en œuvre.

B. FAVORISER L’ATTRACTION ET LA RÉTENTION DE LA MAIN-D’OEUVRE

  1. Créer un crédit d’impôt pour les immigrants de moins de cinq ans qui vont travailler en région

Le taux de chômage chez les immigrants permanents depuis moins de 5 ans est de 11 %[2]. Afin de favoriser leur déplacement en région où il y a 55 %[3] des emplois disponibles au Québec, et pour atténuer l’impact de la pénurie de main-d’œuvre, nous recommandons de mettre en place un crédit d’impôt de 10 000 $ par travailleur par année, pour une période de deux ans.

Un crédit d’impôt similaire existe pour les diplômés. En 2015, ce sont 23 693 diplômés[4] qui s’en sont prévalus.

  1. Bonifier le crédit d’impôt pour les travailleurs expérimentés

Le crédit d’impôt actuel n’est pas suffisamment élevé pour représenter un réel incitatif de retour au travail. Présentement, un travailleur peut obtenir un maximum de 1 500 $ par année.

Plusieurs de nos membres sont intéressés à embaucher des travailleurs expérimentés. Sachant que cette clientèle fait partie des priorités du gouvernement pour atténuer l’impact de la pénurie de main-d’œuvre, nous proposons de bonifier le crédit d’impôt afin qu’il représente un réel incitatif de retour au travail.

[1]CME: EMBRACING CHANGE: Industry 4.0 and Canada’s Digital Future in Manufacturing

[2]ISQ: Indicateurs du marché du travail chez les personnes immigrantes, résultats selon leur durée de résidence, Québec, Ontario et Canada

[3] ISQ: Indicateurs du marché du travail chez les personnes immigrantes, résultats selon leur durée de résidence, Québec, Ontario et Canada

[4]Chaire en fiscalité et en finances publiques – Université de Sherbrooke: Crédit d’impôt pour les nouveaux diplômés travaillant dans une région ressource éloignée

C. FAVORISER LA CROISSANCE ET LA DIVERSIFICATION DES EXPORTATIONS

  1. Moduler le Programme d’aide à l’exportation (PEX)

Le PEX permet aux entreprises de réduire leurs coûts et risques de développement des marchés, augmentant ainsi leur compétitivité face à leurs concurrents étrangers. Toutefois, le programme est restrictif dans sa structure actuelle.

Nous recommandons de maintenir le programme mais de permettre la transférabilité entre postes budgétaires.

  1. Élaborer une stratégie d’exportation

Le marché américain demeure le principal marché d’exportation pour le Québec, il est peu probable que cela change compte tenu de la nature de nos exportations, du niveau d’intégration des chaînes d’approvisionnement et de la proximité de ce marché lucratif. Néanmoins, il est souhaitable de favoriser une diversification des marchés durables pour les manufacturiers.

Pour ce faire, nous recommandons la mise en œuvre d’approche sectorielle afin d’identifier les secteurs qui ont la plus grande capacité de se diversifier, et par la suite, d’identifier les entreprises qui ont les ressources et la volonté pour réussir leur projet de diversification. Le gouvernement pourrait leur offrir un support technique et financier, plus important que ce qu’offrent les programmes actuels, afin de générer des résultats mesurables et durables à l’international.

D. SUPPORT À DES PROJETS PORTEURS

  1. Mise en œuvre de FEMMES 4.0

Le plan d’action du collectif Femmes 4.0[1] a été élaboré conjointement par le Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ), Investissement Québec (IQ) et Manufacturiers & Exportateurs du Québec (MEQ) ainsi qu’une trentaine de collaborateurs.

Ce plan vise à accroître la proportion de femmes travaillant dans le secteur manufacturier d’ici cinq ans de de 26 % à 35 %.

Nous avons eu des discussions préliminaires avec le ministère de l’Économie et de l’Innovation. Nous sollicitons l’appui financier de 770 000 $ du gouvernement pour la réalisation de ce dernier.

[1] Plan d’action FEMMES 4.0 : https://f4.criq.qc.ca/wp-content/uploads/2019/05/femmes-4-0-plan-action-web.pdf

2. Soutien aux projets de production de Gaz Naturel Renouvelable (GNR)

Pour atteindre ses cibles de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, le Québec devra mettre en place des solutions concrètes qui favoriseront le développement économique.  La transition énergétique du Québec suppose la mise en commun d’un portefeuille de plusieurs sources d’énergie.  En ce sens, nous croyons que le Québec doit notamment miser sur l’augmentation de sa production d’énergies renouvelables.

Selon le plus récent rapport Trajectoire de réduction d’émissions de GES du Québec – Horizon 2030 et 2050, le gaz naturel renouvelable (GNR) devrait représenter respectivement 11 % et 66 % des volumes de gaz naturel distribués au Québec en 2030 et 2050. En mars 2019, le Gouvernement du Québec a adopté un règlement qui fixe la quantité minimale de GNR devant être livré par un distributeur gazier dans son réseau.  Pour atteindre les cibles fixées par le règlement et développer la filière du GNR à son plein potentiel, il existe déjà une mobilisation des acteurs de l’écosystème.  MEQ les soutient et souhaite comme eux voir la filière se développer à grande échelle.

Afin de soutenir les projets de productions de GNR en développement, nous croyons qu’un soutien budgétaire de 65 millions de dollars permettrait d’atteindre la cible de 2 % de GNR distribué en 2023 tel que dicté par le règlement et ainsi réaliser des gains au plan des objectifs québécois de transition énergétique.  Ce soutien serait, selon nous, un signal fort pour la poursuite du développement de cette filière pour que le Québec puisse bénéficier des attributs environnementaux associés à la valorisation de ses déchets et résidus organiques. Cette mesure permettrait, par la même occasion, de contribuer au développement des technologies québécoises qui sont actuellement utilisées dans les autres juridictions.

E. AUTRES CONSIDÉRATIONS

  1. Une réglementation et des projets de loi qui nuisent à la compétitivité du secteur

Nous demandons au gouvernement d’avoir une vision 360 sur le secteur manufacturier afin de s’assurer que toute nouvelle législation ne nuise pas à la compétitivité du secteur.

De nombreuses initiatives ont été entamées au cours de la dernière année. Toutefois, cela ne doit pas se faire au dépend de la compétitivité des manufacturiers.

C’est pourquoi il est nécessaire d’avoir une bonne communication entre les manufacturiers et le gouvernement, notamment dans les dossiers suivants : la réforme de la loi sur la Santé et Sécurité au Travail (SST), l’élimination des clauses de disparités de traitement dans les régimes de retraite, le règlement sur les agences de placements et la révision du SPEDE.

  1. Maintien du rabais tarifaire

Le rabais d’électricité est une mesure simple et efficace qui favorise la réalisation de projets majeurs d’investissement au Québec. Nous sommes très satisfaits que cette mesure ait été bonifiée lors de la mise à jour économique de décembre et souhaitons qu’elle soit maintenue.

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