Lettres ouvertes

Cessons d’improviser en matière d’immigration temporaire

16 octobre 2024

Contexte

Le ministre fédéral de l’Emploi, Randy Boissonnault, a récemment fait plusieurs annonces visant à réduire le nombre de travailleurs étrangers temporaires (TET), lesquelles auront des impacts économiques majeurs.

Nous comprenons très bien que l’arrivée massive de nouveaux arrivants dans les dernières années crée de la pression, notamment sur nos services sociaux.

Mais la réponse récente de nos gouvernements au problème a toutefois l’effet de jeter le bébé avec l’eau du bain, sans prendre en considération les deux mesures de contrôle qu’ils ont eux-mêmes déployées pour que les entreprises aient fait leurs devoirs avant de faire appel à des TET.

Dans un premier temps, nous avons l’obligation d’afficher un poste pendant une période d’au moins quatre semaines consécutives avant de pouvoir nous tourner vers l’immigration temporaire.

Dans un deuxième temps, pour recruter à l’étranger et bénéficier de certaines mesures allégées, on doit se fier à une liste de métiers pour lesquels les gouvernements du Québec et du Canada ont reconnu que la pénurie de main-d’œuvre est avérée.

Comment le gouvernement peut-il justifier que ses propres données ne sont plus de bons guides pour analyser les besoins en immigration ?

Des besoins encore importants

Près de 13 000 postes sont encore vacants dans le secteur manufacturier au Québec, et cela, malgré la présence de 12 000 travailleurs étrangers temporaires. Il faut aussi rappeler que le secteur fait l’objet d’un vieillissement accéléré de ses travailleurs. En 2023, 27,3 % des travailleurs de la fabrication étaient âgés de 55 ans et plus.

Nous sommes près de frapper un mur et les mesures annoncées vont accélérer le tout. Certaines de nos usines perdront un travailleur sur quatre d’ici un an.

Pour 80 % des entreprises manufacturières, les limitations annoncées pourront se traduire par des baisses de production. Près de 60 % devront repousser ou annuler des plans d’investissement, selon un sondage mené par Manufacturiers et exportateurs du Québec.

Il faut donc comprendre que la main-d’œuvre disponible est tout simplement insuffisante. Ce n’est pas un caprice de faire appel à des travailleurs étrangers temporaires. Il coûte plus de 12 000 $ pour faire venir un travailleur, sans compter les délais et l’imprévisibilité de son arrivée.

Que doit faire une entreprise qui se retrouve dans une région où le taux de chômage est de plus de 6 % si personne ne cogne à sa porte ? Cette même entreprise n’a plus le droit d’aller chercher des travailleurs étrangers et ne peut tout de même pas forcer les chômeurs à postuler !

Agir avec mesure

Le manufacturier contribue pourtant pour près de 13 % du PIB québécois et compte pour plus de 90 % des exportations. Nos usines sont aussi essentielles au secteur de la construction. Où est la logique ?

Faire du manufacturier un secteur prioritaire viendrait atténuer l’impact des limitations en immigration et permettrait aussi de mieux arrimer les programmes de formation pour préparer la relève ici au Québec.

Nous demandons donc d’une seule voix que les limitations des travailleurs étrangers ne s’appliquent pas au secteur manufacturier.

Le prix à payer pour nos entreprises, pour nos régions et pour le Québec est trop élevé. Monsieur le Ministre Boissonnault, nous vous invitons à venir nous rencontrer, à consulter les entreprises afin de bien comprendre leur réalité et à mettre en place des mesures qui soient viables à terme pour les entreprises, l’économie et nos régions.

*Consultez la liste complète des cosignataires